
Nous continuons notre rubrique " Portraits" des natifs du département de Bakel. Aujourd'hui, nous vous présentons M. Ibrahima WAGNE. Discret et très courtois, M. WAGNE fait partie des premières générations de Bakélois à poser leurs baluchons dans l'héxagone pour des études Post-Bac. Diplômé en Droit, il travaille aujourd'hui à la Sécurité Sociale, entreprise publique qui fait l'objet de toutes les attentions de la part des autorités françaises. Des rives du Fleuve Sénégal aux bords de la Seine, Ibrahima se dévoile. Militant associatif, il revient sur ses souvenirs de Bakel tout en partageant sa vision et sa lecture de la commune et du département de Bakel.
1- M. Wagne Bonjour ! Présentez-vous sommairement à notre public svp ?
Je m’appelle Ibrahima WAGNE. Je suis né à Bakel. Je vis actuellement en région Parisienne, en France. J’habitais le quartier Modincané à bakel. J’y ai effectué mon cursus scolaire jusqu’en 3ème précisément au Collège Waoundé Ndiaye où j’ai obtenu mon BFEM en 1989. Je suis marié et père de famille.
2- Quelle a été votre trajectoire depuis les rives du Fleuve Sénégal aux bords de la Seine en France ?
Après la fin de mes études au collège de Bakel, je suis parti à Tambacounda où j’ai passé trois ans au Lycée Mame Cheikh Mbaye de Tambacounda. J’ai obtenu mon bac en 1993, puis j’ai pris le chemin de la France grâce aux programmes d’échanges et de bourses françaises de la coopération française. Voici, comment j’ai quitté ma terre natale pour me retrouver sur les rives de la Seine.
3-Quand vous entendez le nom de la ville de Bakel, quels sont les souvenirs qui remontent à la surface ?
Bakel résonne en moi comme le premier jour de ma naissance. Je me rappelle de nos escapades au fleuve, les champs, les matchs de foot et surtout les temps forts pendant les vacances scolaires où se déroulaient les Navétanes. Tous les étudiants Bakelois rentraient au bercail. Des occasions unique pour communier entre jeune et se raconter les anecdotes et autres histoires de toute sorte, les résultats scolaires, les petites conquêtes amoureuses entre autres. C’est cela le charme d’une jeunesse passée dans ces contrées chaleureuses et pleines de vie comme Bakel.
4-Vous êtes diplômé en droit, pourquoi avoir épousé cette discipline et dans quelle branche baignez-vous aujourd’hui ?
Effectivement, je suis titulaire d’une Maitrise en droit des Affaires et un DESS Administrateur privé et public. J’ai épousé le droit parce que j’avais des prédispositions dans les matières littéraires et je voulais devenir diplomate de carrière à la base. Le droit était la voie royale pour arriver à mes fins.
Aujourd’hui je travaille dans le domaine juridique à la DCLFR direction du contentieux et la lutte contre la fraude et la réglementation, à la Sécurité Sociale en France.
5- De mémoire, la jeune génération vous voyez souvent avec d’autres jeunes Bakélois de France vous investir dans l’éducation et le social à Bakel, qu’en est-il réellement surtout de nos jours ?
Je suis toujours dans ce domaine à travers le monde associatif. Je suis Président de l’AJPN, une association d’insertion socioprofessionnelle à Noisy le grand en France. Nous venons d’ailleurs de Guédiawaye ( Sénégal ) où vous construisons une salle informatique dans une école élémentaire. Nous avons aussi un projet de développement pour des femmes à Bakel en 2013 et 2014. A Bakel, j’avais réalisé avec mes camarades de l’Association « Djiké espoir » la clôture du mur de l’école de Grimpalé/IMDB, puis nous avons rénové le Centre d’Enseignement Féminin Technique de Bakel.
6-Quelle lecture faites-vous de Bakel commune ?
La ville de Bakel est une des villes les plus historiques du Sénégal. Un patrimoine historique du Sénégal car son fort, l’actuelle préfecture, a été construit au 19 ème siècle. Bakel avec ses vestiges et sa géolocalisation stratégique devait amorcer un progrès économique et social depuis belle lurette.
Bakel devait dépasser son niveau de développement actuel. Bakel ne mérite pas sa situation d’aujourd’hui. Elle manque malheureusement de perspectives économiques, industrielles, de plan d’urbanisme, et d’un plan d’action harmonisé qui pourront lui donner une vision lumineuse pour le futur.
7-Quelle vision avez-vous du département de Bakel globalement, une localité dans une impasse ?
Oui ! On peut dire que c’est une localité dans une impasse. En effet, je peux dire que Bakel pour sortir de cette impasse a besoin de ses ressources humaines d’abord. Nous, fils de Bakel, devrons se réunir à l’instar de la convention des cadres de Bakel autour des questions et des plans d’actions voire d’un agenda quinquennal pour travailler sur des objectifs précis et limités. Ces objectifs doivent être exécutés avec des moyens d’action concertée avec le concours du pouvoir politique de la localité et de la Diaspora.
8- On impute souvent le retard de ce département à ces fils dans la diaspora ou établis ailleurs au Sénégal, partagez-vous cette opinion ?
Non ! Je ne suis pas de cet avis. Je le récuse. C’est grâce aux fils de la diaspora que le département de Bakel est respecté par les autorités de l’Etat de nos jours. N’eut été cette diaspora, la situation aurait pu être plus catastrophique. Je pense plutôt que le retard de Bakel est imputable à la mauvaise conduite des affaires publiques à l’instar des autres villes du Sénégal. Si vous allez à Saint Louis, première capitale du Sénégal, vous ferez le même constat. Et pourtant la diaspora Saint-louisienne est de loin la première au plan des ressources humaines. C’est l’ensemble des villes du Sénégal qui sont en retard à cause d’une gestion publique inefficace.
Il faut parler, à la rigueur, de responsabilité partagée. La diaspora a joué sa partition pour juguler ce retard car elle a toujours apporté sa contribution à Bakel, de la construction de la grande Mosquée à la construction d’un centre de formation professionnelle récemment.
9- Croyez-vous aux hommes politiques Bakélois de notre temps ? Quelle lecture faites-vous de la sphère politique Bakéloise ?
Ces sont des acteurs de la vie politique et leur mérite est d’avoir pris l’initiative de s’engager pour une cause en vue de développer leur pays, leur localité. A la question de savoir est ce que je crois en eux est difficile à répondre. Il faut se mettre à leur place. Seuls, ils ne peuvent pas répondre aux aspirations grandissantes des populations. C’est une tâche difficile. Il faut qu’ils sentent derrière eux un soutien sans faille et solide, sincère sans retour. Malheureusement la politique au Sénégal va de pair avec à des intérêts immédiats, ce qui complique et entache leurs missions. Il faut croire en eux, leur octroyer un certain crédit pour qu’ils réussissent leur mission. Il faut les épauler et s’investir pour l’atteinte des objectifs.
10-Si vous étiez aujourd’hui édile de la municipalité de Bakel ou député à l’Assemblée Nationale, quelles seront vos priorités dans le court et moyen terme ?
La première priorité est l’éducation, développer les conditions de l’éducation, une jeunesse bien formée est gage de succès et de développement. Il faut pour cela des structures d’accueil performantes, des moyens matériels, et un encadrement de qualité.
Il faut aussi des structures de transport au sein de la ville de Bakel. Des routes dans la commune et des routes entre Bakel et les villages environnants. La santé serait aussi une priorité car une politique de santé publique est un atout pour la population afin de pouvoir conduire efficacement les actions de développement.
Impliquer les habitants dans l’agriculture, l’élevage devrait aussi faire partie des priorités. Développer ce secteur qui est la base de tout développement pour répondre aux besoins de la consommation locale et de pouvoir engranger des sources de revenus pour les habitants. Il faudrait aussi leur apporter une aide à travers la coopération avec les ONG du Nord. Mettre en place des structures de micro-crédit pour les femmes du département de Bakel, une couche vulnérable qui devrait bénéficier de financements pour développer des activités génératrices de revenus.
Enfin, implanter une industrie liée à l’agroalimentaire. En effet, la localité est une terre d’agriculture et on peut créer une usine de transformation qui fera une pierre deux coups. Ce sera un tremplin pour l’emploi des jeunes et des femmes et par voie de conséquence un frein à l’exode rural et l’émigration. Cela est indispensable au développement local.
11-A la lecture de votre CV, je note que vous connaissez plus d’un rayon dans la sécurité sociale, en quoi consiste cet organisme tant cher à la France ?
La sécurité sociale est un organisme qui contribue au maintien et à l’amélioration de la santé des populations et répond à une politique de santé publique. Grâce à cet organisme, les français peuvent se soigner et avoir les moyens pour répondre favorablement aux objectifs de développement de la France.
Aujourd’hui, tout le monde peut se soigner avec les mêmes conditions quels que soient les différents niveaux de revenus.
Je travaille au niveau du contentieux où on essaie de limiter les déficits de la sécurité sociale. D’ailleurs, je vais préparer une thèse sur la fraude à la sécurité sociale, les failles du système. L’objectif de cette étude est de prévenir les différentes fraudes qui gangrènent le système de sécurité sociale française, tant vantée à travers le monde.
12-Comment voyez-vous l’immigration Bakéloise en France ?
L’immigration est un atout pour la ville de Bakel. Son organisation en France connait une évolution en dents de scie. Il y a eu une époque où les Bakelois étaient bien organisés au sein d’organisations qui initiaient des soirées culturelles et même des voyages à Bakel pour les enfants issus des familles Bakeloises. Un pèlerinage riche en enseignements pour nos enfants.
Aujourd’hui on a tendance à voir une autre forme de regroupements différents, qui a tendance à creuser un fossé entre les générations. Il est encore temps de revenir aux bonnes pratiques, mais cela est possible qu’au sein d’une seule organisation.
Il faut favoriser le développement de notre culture soninké en France pour nos enfants, continuer à organiser des voyages de retour aux sources. Ceci construit un pont entre nous et notre cher Bakel. En effet, un ingénieur Bakelois né en France pourra penser à Bakel que s’il connait les réalités et l’importance de ses origines.
13-Dites-moi, connaissez-vous la Convention des Cadres de Bakel, que pensez-vous de cette association ? Avez-vous des critiques et des suggestions à l’encontre de cette association ?
Oui ! Je connais la convention des cadres de Bakel à travers les comptes rendus de leurs actions et je connais certains membres du bureau de ladite association.
C’est un cadre de concertation d’une haute qualité intellectuelle et il faut encourager ce genre d’organisation, qui est ou qui peut être la tête pensante des actions de développement de notre Bakel. Je suggère que la Convention organise chaque année un Symposium en commençant par Bakel pour mettre en place l’Agenda pour le développement de Bakel tout en impliquant les acteurs internationaux du développement. Et les autres années, internationaliser la rencontre par exemple à Paris où la convention pourra avoir des financements pour accompagner les plans d’actions et mesurer les résultats à travers des ateliers d’évaluation de l’Agenda pour le développement de Bakel.
14-Allons sur le terrain de la politique Sénégalaise, depuis l’accession de Macky Sall à la présidence, quel regard portez-vous sur le Sénégal ?
C’est un pays qui a un système politique démocratique de par son histoire, sa tradition et où les hommes politiques sont en avance sur leur temps. L’accession de Macky Sall est le fruit de l’action d’une société civile très organisée et en pleine maturité démocratique. Les institutions sont sauvegardées grâce à la mobilisation de la société civile et le pays est parti pour garantir la marche de notre société vers les horizons meilleurs. J’ai espoir que le pays va se développer et les institutions vont être fortes et la classe politique ne pourra plus jouer avec l’avenir du Pays.
15- Le département de Bakel n’a jamais su tirer son épingle du jeu pendant les règnes socialiste et libérale, pensez-vous que la donne pourrait changer avec Macky Sall ?
C’est une tâche qui incombe aux hommes politiques du département. La gestion est décentralisée de nos jours. Ce sont nos hommes politiques locaux qui doivent conduire efficacement les destinées de notre contrée. C’ est à eux de changer la donne en prenant en compte les aspirations des populations locales. J’ai dit tantôt que Bakel est dans une impasse sur plusieurs plans. Nous avions identifiés nos faiblesses. L’heure est d’y remédier pour juguler nos maux.
16- Vos critiques et suggestions sur le site de Bakelinfo.com ?
Bakelinfo.com est la fierté de tout bakelois. C’’est un site qui est à encourager pour une bonne information sur les affaires et les nouvelles de Bakel. Il faut surtout lui donner une image nationale et internationale sur le paysage médiatique.
17- Votre dernier mot M. WAGNE
Je te remercie particulièrement, Samba Koita, pour ton engagement et ta lutte acharnée pour donner des nouvelles du pays. Les évocations de notre cheminement, de notre vécu à Bakel, nous originaires de Bakel, à travers Facebook sont instructives. Je te tire mon chapeau pour ce travail colossal de tous les jours. Je suis fier d’être Bakelois, et je ne ménagerai aucun effort pour apporter ma contribution à l’édifice du développement de Bakel. Et je termine par cette parabole de la pensée du Roi Guézo qui disait « Si tous les fils d’afrique venaient par leurs mains boucher les trous de la jarre percée, le pays serait sauvé ».
Samba Fodé KOITA, www.bakelinfo.com