
Portrait de la styliste franco-sénégalaise Adama Ndiaye, plus connue sous le nom d’Adama Paris, initiatrice de plusieurs événements dédiés à la mode africaine. Aujourd’hui, Adama Paris est installée à Dakar. Elle s’est déjà fait un nom dans le milieu de la mode et elle a d’autres cordes à son arc.
Lorsqu’elle est dans la capitale française, Adama Paris reçoit les journalistes dans son concept store ouvert en mai 2019. Elle y expose et vend sa marque de vêtements, ainsi que des produits d’autres créateurs africains.
Le concept store d’Adama Paris est dénommé Saargale, un mot en wolof qui signifie « rendre hommage ». Décontractée, en pantalon-jean rapiécé et veste militaire brodée, Adama Paris évoque l’activité qui la fait vivre aujourd’hui : « J’étais une ancienne banquière, une économiste qui a toujours aimé la création. Avec le temps, ma passion est devenue mon travail. Donc, j’ai une chance inouïe de vivre ça. »
Une passion qui est née en France avant son adolescence
Adama Paris baigne aujourd’hui dans le milieu de la création. Elle se souvient du moment où est née sa passion : « Mon premier contact vraiment avec la mode, j’étais allée toute petite voir un défilé de monsieur Yves Saint-Laurent. J’étais émerveillée ! Je me rappelle de ce défilé comme si c’était hier et c’est là où je me suis dit que c’est ce que je veux faire. Après, ma mère m’a dit : mais, tu veux être modèle [mannequin] ? Non, je voulais être comme monsieur Saint-Laurent. Et à l’époque, il y avait de belles femmes noires dans les défilés. Et ça m’a donné envie. »
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Née à Kinshasa en 1976 d’un père diplomate, Adama Paris a d’abord fait des études d’économie et son premier métier, c’est la banque. Ce qui d’ailleurs, en partie, l’aidera à prendre son envol pour se consacrer exclusivement à sa passion, en contractant, avec l’aide de son directeur, un prêt auprès de sa banque. Et elle décide de s’installer à Dakar : « J’avais envie de faire de belles choses à Dakar, d’être reconnue et surtout, il y avait beaucoup des choses à faire. Il n’y avait pas de Fashion Week quand je suis arrivée, donc j’en ai créé une il y a 18 ans déjà. Donc, ça m’a donné ce sens de l’entrepreneuriat et finalement c’est devenu un devoir de faire des choses pour chez moi et pour tous les créateurs africains qui avaient les mêmes challenges, les mêmes problèmes que moi. »
Elle a créé par la suite plein d’autres choses, notamment Black Fashion Week, devenue aujourd’hui Black Fashion Experience, pour sortir les créateurs africains du continent et les montrer ailleurs. En France, au Brésil ou encore au Canada.
Une frénésie de créer, pas seulement dans la mode
Elle a aussi créé une télévision en 2015 – Fashion Africa TV disponible sur tous les réseaux de Canal+ en Afrique et sur d’autres continents – une agence de promotion des créateurs, puis une autre, dédiée à l’organisation d’événements. Malgré quelques critiques, le styliste nigérien Alphadi salue le parcours d’Adama Paris, qu’il connaît depuis une douzaine d’années : « Je l’ai connue en tant que petite fille qui essaye de se battre, mais des fois elle va très fort. Elle est capable d’écraser pour arriver à son but. La mode, ce n’est pas comme ça ! Les anciens sont à respecter et Adama Paris veut absolument aboutir en 5 à 6 ans, à un niveau qu’on atteint en 30 à 40 ans. J’adore ce qu’elle fait, mais elle est un peu spéciale dans sa vision et dans son départ pour écraser les grands, pour arriver à ce qu’elle aime. »
Le respect des aînés dans la création ne l’empêche pas de revendiquer sa singularité.
Née Adama Ndiaye, Adama Paris se définit comme une citoyenne du monde, curieuse, aventurière et voyageuse. Une femme qui sait ce qu’elle veut. Elle n’a ni participé ni assisté à la semaine parisienne de la mode qui s’est déroulée à la fin février 2020 : « Quand on arrive dans ce monde de la mode, on croit que c’est une grande famille et puis on se rend compte que ce n’est pas du tout une famille. Du coup, j’ai appris à faire les choses comme une insurgée, de mon côté, et j’ai appris à ne plus attendre de validation d’un monde très austère à ce que je veux faire, c’est-à-dire une mode différente, qui ne respecte pas forcément les codes de ce monde-là. Au début, j’étais contente d’être dans Vogue ou dans Elle, mais ça fait tellement longtemps que je vois les inégalités qui existent dans un monde un peu raciste aussi. J’entends bien, je suis une petite qui fait mon truc dans mon petit coin, mais ça me va. »
Ce qui est important, explique Adama Paris, c’est d’avoir réussi à transformer sa passion en une entreprise rentable.
Le concept store est le petit dernier de l’entreprise Adama Paris. L’espace Saargale propose du fabriqué en Afrique par des Africains. En plus du lieu ouvert à Paris, le concept Saargale existe déjà à Casablanca, deux autres devraient ouvrir au courant du mois d’avril 2020 à Lomé et Douala. Suivront plus tard Berlin, New York et aussi trois autres villes africaines.
source ; ferloo.com