
Pas une goutte d’eau n’est tombée sur le sol depuis plus d’un mois. Certaines plantes commencent déjà à perdre leur verdure. Aux abords des routes, la nature s’appauvrit, la désolation s’installe dans les environs. Les transhumants de retour de leur long séjour dans les vertes prairies élaguent sur leur chemin les arbres, surtout les épineux et brûlent la brousse. Ils augmentent de ce fait la tristesse qui envahit l’environnement. Le passage du feu est remarquable : tous les voyageurs s’apitoient sur le sort réservé à nos brousses et forêts par des « délinquants » inconscients qui se soucient le moins du monde de ce bien commun qu’est la nature.
Les paysans, riches de leur bon hivernage, savourent la joie des récoltes. Les bêtes bêlent, meuglent, braient, hennissent ou croassent pour animer le village.
Les coqs ont chanté depuis l’aube pour réveiller les hommes. Ces derniers, pour la plupart d’entre eux, après la prière du matin, comme Mocirédin, égrènent leur chapelet. Ils remercient ainsi le BON DIEU pour sa magnanimité.
Les éternelles prières, les mêmes incantations, les demandes similaires à celles de la veille reviennent tous les jours ! L’on ne se lasse pourtant pas de reprendre la même litanie.
L’homme est de tout temps un mendiant. Il a toujours cherché à avoir plus, à savoir plus, à pouvoir plus, autant sinon plus que les autres ; depuis la nuit des temps sa sébile n’a jamais été pleine. Son contenu n’a jamais suffi à assouvir sa faim ou à étancher sa soif. Il en veut toujours plus. Toujours et encore plus. Il dormira, tous les soirs de clair de lune ou quand l’astre de la nuit s’absente, en rêvant, se voyant tel un roi, ne manquant de rien, ayant tout à portée de main ! Il se réveillera ragaillardi dans son sommeil par Satan.
Diambéré Khoumba, l’épouse de Mocirédin a retenu une des leçons d’éducation sanitaire qu’applique heureusement à la maison son unique fille Mma Tokhora : elle arrose toujours avant de balayer la cour. En chantant pour montrer la beauté de sa voix, Diambéré est au four et au moulin. Elle nettoie, elle range, elle crée.
A peine partie à l’école, Mma Tokhora revient aussitôt en pleurs.
« -Que se passe-t-il, crient en même temps le père et la mère ? Que t’arrive-t-il ?
-Notre Professeur d’Anglais est décédé à l’hôpital, ce samedi 10 Novembre 2018. Il ne lui restait que huit petits jours, c’est-à-dire une semaine, pour signer dix ans de présence professionnelle à Bakel (le 18 Novembre). Monsieur Bamba Fall nous a quittés !
-Oh ! Je le connais. Les rares fois qui m’ont permis de le rencontrer, c’était à l’occasion de la remise des bulletins au collège. Un homme courtois, calme, qui respecte tout le monde !
-Mpaaba (mon père),c’est pourquoi donc à l’hôpital, à l’annonce de son décès, tout Bakel y était : les enseignants en première ligne, avec à leur tête l’Inspecteur de l’Education et de la Formation, choqués par la perte d’un collègue, loin de chez lui, se sacrifiant pour les enfants de son pays, les membres de « Variétés Club », cette équipe de football composée en majorité de fonctionnaires, les parents d’élèves, ses beaux-parents, ses amis et des connaissances, tous venus lui rendre l’ultime au revoir, le « GOOD BYE SIR » .
-Une cérémonie très triste qui sépare à jamais des êtres qui ont vécu en parfaite harmonie durant une décennie ou même plus, une épouse et son mari, des enfants et leur père, des amis, des voisins. Diambéré Khoumba ne parvient pas à retenir ses larmes. Elle connaît bien l’épouse de feu Bamba Fall. Elle imagine la douleur qu’elle ressent en de pareils moments.
-Ce que l’on doit tous faire maintenant, dit Mocirédin, c’est prier pour le repos de son âme. Que le TOUT PUISSANT l’accueille dans son PARADIS. Amen !
Idrissa Diarra, bakeinfo.com