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MociredinReligion1A peine  revenu de la mosquée, après la prière de 14 heures, sous le chaud soleil du mois de Mars, Diambéré Khoumba  tend une enveloppe grise à son mari Mocirédin, tout étonné.
Transpirant à grosses gouttes comme un porc, il se retient de poser des questions mais ne parvient pas  à se calmer. Une certaine angoisse se lisait sur son  visage labouré par des rides, message clair d’une anxiété persistante.
<<-Il n’y a aucune possibilité sur cette terre de se reposer, s’inquiète Mocirédin  s’asseyant lourdement sur la natte  étalée à  côté des canaris, sous  le « Nîmes », cet arbre familier à Bakel. Il est partout : dans les maisons, les écoles, les hôpitaux, les rues…


-Mon mari, ne disais-tu pas toi-même que celui qui pense être venu  sur notre terre pour se reposer doit vite déchanter et se retrousser les manches  ou mettre volontairement fin à ses jours?
-Tu as raison, Diambéré Khoumba, mais cela ne  m’explique toujours pas le contenu de cette enveloppe que tu  m’as remise tout à l’heure !
-Mocirédin, mon mari, toi comme moi ne savons ni lire ni écrire. A qui demandes-tu ce que contient cette « lettre » ?
-Appelle donc Mma Tokhora  afin qu’elle lise le secret de cette correspondance, crie l’époux, visiblement furieux de son « analphabétisme » !
-Papa, maman, que se passe-t-il, ici ?
-Ma fille, nous sommes très tendus depuis que cette enveloppe grise nous a été remise. Est-ce une convocation de la Gendarmerie, du Préfet, du Maire ou…?
-Soyez  calmes, papa et maman. C’est une carte d’invitation/soutien de Cheikh Ismaila Dramé. Il organise une grande ZIARRA, le 25 Mars 2018 à la Mosquée située en face de la Case des Tout Petits, tout juste après le Service Départemental  du Développement Rural (SDDR).
Il est écrit que cette date coïncide avec le premier anniversaire de la mosquée. C’est aussi une occasion pour revisiter la vie et l’œuvre d’un grand marabout Soninké CHEIKHOU MOUHAMADOU LAMINE DRAME.
-Es-tu sûre de ce que tu lis et traduis, Mma Tokhora, demande  Diambéré Khoumba, les larmes aux yeux ?
-Mma, c’est la vérité ! Appelez mon cousin Mapaté. Il vous dira la même chose.
-AL HAMDOULILAH ! respire profondément Mocirédin. Je pourrai  dormir tranquillement et repasser dans ma tête, les hauts faits du marabout Mouhamadou Lamine Dramé.
-Papa, saute sur l’occasion Mma Tokhora, parle-moi de ce marabout !
-Eh bien, ma fille, je ne suis ni historien comme mon ami Kader Tandia, ni Anthropologue comme  Yaya Sy. Autant qu’eux, je n’aurai pas la capacité de parler en long et en large de cet homme  hors du commun. Cependant, je vais  te dire le peu de choses que ces deux  intellectuels m’ont raconté sur le Marabout.
CHEIKH  MAMADOU LAMINE DRAME est né vers  1840 à Goundiourou, à une dizaine de kilomètres  de Kayes, dans le Khasso (ancien Soudan Français, actuel Mali).
Il a commencé ses études coraniques, d’abord auprès de son père, grand marabout, avant de s’éloigner de sa famille  pour arriver, adolescent, à Modinkany, dans l’Université  Coranique, le  « Moysi », à Bakel.
Charismatique, il se faisait déjà remarquer parmi les autres « Talibés » par son intelligence,  ses capacités pour convaincre, haranguer les foules, les organiser.
A Bakel, sa formation  coranique solide et ses différentes rencontres avec  les Bakélois ont  contribué à installer en lui la confiance et surtout l’engagement de propager la religion musulmane.
Cette hantise le poussa, à peine âgé d’une  vingtaine d’années,     vers 1860, à participer à une expédition  des gens du Goye et du Kaméra contre le Gamon. Capturé et gardé durant de longs mois, il parviendra à se libérer, puis à prendre la route du Fouta Toro, terre natale du vénéré CHEIKH  OUMAR FOUTIYOU TALL qui l’attirait pendant son séjour Bakélois.
De cette partie de notre pays, et au bout de trois années d’un long voyage, il atteignit la Mecque pour le pèlerinage. Il vécut dans ce lieu saint de l’Islam pendant  sept ans se consacrant à la prière et à  l’étude approfondie du Coran.
Sur le chemin du retour vers Goundiourou, son village natal, étant devenu El Hadj et Cheikh,  une réputation grandissante le précédait partout où il passait.
Au fur et à mesure qu’il s’éloignait de la Mecque et s’approchait de « chez lui », le nombre de ses « Talibés » augmentait.
Je ne vais pas m’appesantir sur ses « luttes » contre les Colons  (surtout en 1886/1887). Je n’insisterai pas non plus sur les correspondances qu’il a eues à échanger avec : Samory Touré, Aguibou Tall, fils d’El Hadj Oumar, Saer Maly, fils de Maba Diakhou Bâ.
Au bout d’une vie pleine d’amour pour la religion musulmane et son ethnie (le SONINKE), il a réellement marqué son époque par son courage et son  érudition.
CHEIKHOU MOUHAMADOU LAMINE DRAME a quitté ce bas-monde un 12 Décembre de l’année 1887 à Toubacouta.
Ce n’est pas fortuit si le plus grand camp militaire de la région de  Tambacounda porte son nom.
-Papa, merci pour cette belle leçon d’histoire que tu viens de m’enseigner !
-Mma, moi, je ne suis pas satisfait car, partout au Sénégal, il y a des ZIARRA, des GAMOU, des MAGAL, des…., des….., mais chez nous, malgré nos grands marabouts et leur savoir incontesté, ils sont à peine connus ! Nos TANDJIGORA, nos DRAME, DIAKHITE, KEBE, SAKHO,  WANE sont pourtant ici, dans ce quartier  « MODINKANY » (chez les marabouts), réservés, humbles, ne voulant pas « paraître ».
-Papa, espérons que la célébration du premier anniversaire de la Mosquée et tout ce qui a été dit pour rappeler  la vie et l’œuvre du  vénéré CHEIKH MAMADOU LAMINE DRAME contribuent  à mieux faire connaître cet illustre marabout Soninké.
-Tout en saluant la mémoire de tous ces grands marabouts Soninkés aujourd’hui disparus comme Hamidou Tandjigora, Thiondy Dramé, Saloum Dramé, Samba Maimouna Dramé, Mamadou Kawu Diakhité,  Sikhou Boye Diakhité, Mamadou Sikhou Dramé prions pour que dès l’année prochaine, un monde de fidèles viennent commémorer avec nous  cette journée du 25 Mars à côté du Marabout  CHEIKH ISMAILA DRAME. >>


Idrissa Diarra, bakelinfo.com

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