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Mociredin Avril2017
Il fait très, très chaud actuellement dans la capitale du Gadiaga ! Les margouillats ne craignent plus les hommes : ils s’approchent sans peur des canaris pour avoir un peu de fraîcheur. A partir de 10 heures, le soleil darde ses rayons. Les hommes, les bêtes et même les plantes souffrent. Comment serons-nous à partir du 27 Mai, début  du mois de Ramadan !

Mocirédin a décidé ce matin de faire les cent pas malgré la chaleur et le vent. Il ne peut pas passer tout son temps chez lui à regarder sa Diambéré Khoumba aller et venir, même si sa démarche est gracieuse, même si le parfum provocant de l’encens qui se dégage de la chambre tente, même si l’agréable odeur venant de la cuisine aiguise sa faim ! Non, il ne peut pas rester là à rêvasser ! Il lui faut sortir.
Hors de chez lui, Mocirédin se rend compte qu’il a mal mis ses chaussures : le pied droit porte la chaussure  gauche et le pied gauche, la droite. Il rit puis les remet en ordre.
<<- Si Diambéré m’avait vu….La chaleur me rend fou, se dit-il. J’irai à Goundeyni me rafraîchir le corps et les idées. Cela atténuera certainement la hargne des rayons solaires.
-Où vas-tu si vite, mon ami, remarque Ndirissa Sidi ? Moi, j’ai difficilement dormi et je passe tout le temps à transpirer.
-Allons ensemble vers Faloboula respirer l’air pur que dégage la nature. Nous traverserons le pont de Grimpallé qui devient dangereux pour les centaines d’enfants des écoles IMDB, Elisabeth Ndiaye et ceux du Collège. Les murs en pierres tombent par endroits en laissant voir des trous qui font frémir les passants. N’attendons pas qu’un drame survienne pour pleurer et intervenir. De la place de l’Indépendance à Goundeyni, le goudron n’existe plus. Le passage du pont est devenu un véritable calvaire pour les cyclistes comme pour les automobilistes.
-Et cet attroupement devant nous ? Est-ce déjà la récréation ou encore un autre mouvement de grève des enseignants ?
-Je ne le pense pas. Approchons-nous pour en savoir un peu plus. Eh, jeune homme que se passe-t-il ici ?
-Ce sont les filles du Collège qui tombent en << crise >>, répond  le garçon tout tremblant.>>
Mocirédin et Ndirissa Sidi entrent dans l’école et voient un spectacle désolant : partout des fillettes sont couchées, leurs camarades essayant de les retenir pendant qu’elles crient et se démènent comme des forcenées. La << crise >> multiplie leurs forces. Il faut beaucoup de personnes pour les ramener au calme et cela pour un court instant.
Un des véhicules de l’Inspection de l’Education et une ambulance du District de Santé font la navette entre le Collège et le domicile des enfants. Les parents à leur tour font appel au guérisseur ou  conduisent leur collégienne de fille auprès du marabout du coin. Incantations après incantations, le << Djinn >> s’exprime à travers la voix de la fillette sous son emprise. Au prix d’un effort colossal et souvent grâce à la vérité des versets du Saint Coran, le << mal >> est chassé et la fille retrouve sa lucidité. Parfois, le << diable >> trompe son monde et reste pendant plusieurs jours dans le corps de l’enfant.
<<-Mon ami, d’où nous vient cette nouvelle maladie aussi, demande Mocirédin?
-C’est nous qui  l’avons créée ! Nous sommes les seuls responsables, nous les parents. Nous n’éduquons plus nos enfants ! Nous les regardons s’habiller n’importe comment, marcher comme des mannequins, se comporter comme des dévergondées sans réagir.
-C’est vrai. Aussi vrai que je m’appelle Mocirédin, qu’Aissé Moussa est ma mère et que Diambéré Khoumba restera  mon épouse jusqu’à la mort! Ndirissa Sidi, le monde a changé ! Le temps nous manque  pour nous occuper de l’essentiel, c’est-à-dire l’EDUCATION. Nous passons notre temps, tout notre temps à courir derrière les << détails >>, à nous époumoner inutilement.
-Tu parles de temps, Mocirédin ? Quel âge as-tu ? Tu as eu la chance  de vivre plus de quarante ans et tu indexes toujours le temps ! Il ne te suffira jamais !Ce que nous devons exiger à nos enfants, ce sont des tenues décentes, des comportements sérieux.
-Toi, tu ne montres du doigt que les parents. Et la part de l’école ? De l’enseignant ? De l’Etat ? De la société ?
-A t’entendre, tout le monde  est responsable !
-Oui, répond rapidement Mocirédin, mais à des degrés différents ! Les niveaux de responsabilités s’accroissent selon les concernés ! L’école, il est vrai, est le lieu  où l’on apprend la langue et la culture françaises. Cela ne fera jamais de nous des Français. Le tronc d’arbre, à beau séjourner dans l’eau, ne se transformera jamais en caïman ! La bonne preuve, pour qui avais-tu voté hier entre les candidats à la Présidentielle Française ? Pour Lepen ou Macron ?
-Je suis citoyen sénégalais et tu le sais. Comment pourrai-je voter dans un scrutin étranger ?
-C’est une manière simple et même simpliste de dire que nous ne devons pas refuser l’ouverture mais nous sommes obligés de garder nos pieds dans nos souliers en nous enracinant d’abord. Nous avons trop parlé comme d’habitude. Aidons ces pauvres enfants à s’éloigner des <<Djinns >>.
Dans un brouhaha indescriptible, élèves, professeurs, parents, vendeuses, curieux s’agitent : le Collège de Grimpallé ressemble à un marché hebdomadaire. Quand est-ce que les cours pourront reprendre sérieusement avec cette atmosphère de << SURNARUREL >> qui plane dans cet établissement ?
Les deux amis oublient la chaleur. Ils retournent à la maison, tuer le temps en prenant les << trois normaux >>.


Idrissa Diarra, bakelinfo.com

 

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