
L’homme est un rêveur ! Ce qui est acquis est vite oublié ! A la seconde suivante, il veut plus, beaucoup plus, encore plus…Son désir de « grandir », de devenir comme…de changer est perpétuel !
Cependant, s’accepter, « se suffire », être humble, avoir toujours le sourire aux lèvres, qu’importe les difficultés, voici quelques traits de caractère de celui que nous avons rencontré pour vous aujourd’hui : il porte le nom de : ABDOU SALAM KOITE ! KOÏTE DIALY HORON !
Griot, fils de griots, comme il se définit lui-même, cet homme né il y a une cinquantaine d’années (le 10/7/1974 à Bakel) dans une grande famille (LOU BAA : la grande maison) avec un handicap : il est non-voyant depuis sa naissance. Dans ce quartier populaire où vivent plusieurs ethnies (Soninkés, Khassonkés, Peulhs, Bambaras, Maures...), la Montagne Centrale a cette particularité de rassembler des hommes de Culture, peut-être bien influencés naturellement par les nombreuses familles de Griots, de Forgerons et de Bijoutiers qui y vivent.
Malgré la situation, à l’époque de son quartier « pierreux », Salam (comme l’appelle affectueusement tout le monde) est parvenu rapidement à se situer dans l’espace de son milieu immédiat avant de « découvrir » grâce à sa ténacité, sa perspicacité, tous les endroits de sa ville natale : Bakel.
Très éveillé pour son âge, bien qu’un sens, cet atout important qu’est la vue lui manque, Salam n’a considéré son handicap que comme une volonté divine. De ce fait, rien ne l’empêchait d’être aussi joyeux que les autres.
Bon vivant, il reconnaît tout le monde grâce à son cerveau bien développé. Les voix, les pas, la respiration des autres, tout l’oriente vers le nom de la personne en face de lui !
Il aime beaucoup plaisanter, ce qui lui fait toujours garder, de jour comme de nuit, ce sourire moqueur. Il a, bien enfoui dans sa gibecière secrète, le bon et beau mot pour engager la conversation facilement avec n’importe qui et pour dérider les tensions à certains moments.
C’est ce qui a poussé son père Abasse Koité (puisqu’il n’y a pas d’école spécialisée à Bakel), à le confier à Thierno Djigo, un marabout Toucouleur pour apprendre
les versets du Saint CORAN. Ensuite Thierno Alfousseynou Sakho prend le relais après le départ du premier au Fouta.
Il terminera sa formation coranique auprès du vénéré Aladji Samba Maimouna Dramé qui l’aimait bien pour son intelligence.
Ce passage auprès de ces hommes de DIEU a renforcé sa foi tout en le rendant « philosophe » !
En bonne harmonie avec ses nombreux frères et ses sœurs, Salam l’est avec tout le monde : son ouverture d’esprit lui permet d’être en bons termes avec toute la société.
Parfois, sa voix forte appelle les fidèles pour la prière à la Mosquée « Tidiane » située près de la Place de l’Indépendance.
Abdoul Salam Koité est Griot et fier de l’être ! Même s’il ne chante que très rarement, le fils de Yaye Kanouté, marié, père de trois enfants (deux garçons et une fille), s’essaie au cours des cérémonies de mariage et de baptême, à taper le tambour d’aisselle, le « dong-donghé » ou même le gros tam-tam, le « doung-dounghé ». Sans aucune gêne, le Griot, fils de Griots anime avec ses frères des moments particuliers comme le Festival Ondes d’Intégration (F.O.I) de JIIDA FM.
L’époux de Mariame Sankhane n’a jamais baissé les bras ! Bien soutenu par sa famille, au sens large du terme, Abdoul Salam ne peut pas rester inactif !
Que peut-il faire d’autre, si ce n’est que tendre la main, surtout les vendredis, devant la Grande Mosquée de Modinkané ?
<<-Non ! Ndirissa Mociré, rétorquera-t-il, si l’on m’aide, je peux faire du commerce avec mon épouse. Cela m’occupera davantage et je me moquerai moins des gens, ajoute-t-il en riant !>>
Cet homme qui marche toujours sans canne, sans guide, ce Montagnard père de famille exemplaire, ce Griot qui n’a pas oublié sa culture, ce musulman pratiquant vous regarde, SOCIETE, les yeux dans les yeux, malgré son handicap et vous tend les deux mains, non pas pour quémander, mais pour construire avec vous son rêve : se rendre encore beaucoup plus utile. Ne tuez pas cette joie de vivre en lui. Bâtissons ! Réalisons ensemble, avec lui ses vœux, surtout en cette période de la pandémie de la COVID-19.
Avec ABDOUL SALAM KOÏTE jusqu’à…la mort !
Idrissa Diarra