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La Voix du département de Bakel

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Index de l'article

"Souvent les journalistes font l'éloge de politiciens, d'entrepreneurs... mais oublient souvent certains batisseurs de l'ombre. Moi, c'est avec plaisir et intime conviction que je vous fais découvrir une femme au coeur d'or : Feinda dit Cissé KANTE".
" Eduquer une fille c'est éduquer tout un peuple", j'y crois fermement. Je foulai le sol Bakélois un jour du mois d'Octobre 1988. 21 ans plus tard, je garde encore un souvenir de cette grande dame à l'allure forte et imposante . Elle avait une taille de basketeuse ( grande et forte) et une corpulence d'amazone. Elle était toujours habillée en tenue africaine comme si sa scolarisation à l'école française n'avait point d'influence sur sa personnalité. Si je me trouve aujourd'hui à parler de cette grande dame au coeur en or c'est parce qu'elle a compté énormément à l'éducation de toute une génération de jeunes d'horizons divers. Elle était respecteuse et humble. Jamais, je ne l'ai vue hausser le ton sur son prochain fût-ce un enfant. Chaque année elle accueillait des dizaines d'élèves venant de tous les goyes du département de Bakel malgré ses moyens limités. Ainsi chaque ouverture d'année scolaire, son domicile devenait un " festival de Villageois ". Tuabounkés, Manaélinkés, Yellingarankés, Diawarankés, Touriyimankés, Gandenkés... se cotoyaient sous sa tutelle. Elle n'était ni professeure ni maîtresse d'école mais son caractère et son humilité lui conféraient un pouvoir que même les "marabouts d'école coranique" ne possédaient pas. Elle avait rien à envier aux éducateurs du monde moderne.  On l'appelait à son insu "Inspecteur Diokhané" emprunté au célèbre rappeur de Yeumbeul Pacotille. Ce nom était connu de tous les jeunes du quartier de la grande mosquée de Bakel. Hommes, femmes et jeunes vouaient une admiration sans faille à cette gentille mère de famille. Je ne dirai pas " dame de fer " parce cette femme ne se considérait pas comme l'égal des hommes et ne se bagarrait jamais. Une pacifiste pure et dure. Si Gandhi la connaissait de son vivant, il l'aurait sans doute décorée avec tous les honneurs. Telle une tombe morte, elle ne s'immiscait jamais dans les affaires d'autrui. Elle était honnête, franche et gentille. Sa maison conjugale était le ralliement de tous les vieux du quartier. Ils jouaient aux cartes ou au damier avec un vacarme sans précédent sous l'oeil moqueur des jeunes enfants. Comme chaque table de "belotte", les discussions étaient houleuses entre vieux. Ils étaient du même "Feede" ( tranche d'âge) et venaient souvent de quartiers lointains. Sur ce territoire d'hommes, elle avait fait sa place. Elle était respectée et écoutée. Elle ne s'énervait point dans ces bruits incessants qui pouvaient durer du matin au soir. Ce "club" de vieux retraités souvent sans occupation ne trouvaient d'échappatoire que dans les jeux. Ils criaient, s'insultaient et s'amusaient tels des adolescents sous le regard de la sentinelle. Elle était la confidente de ces vieux desoeuvrés qui courbaient l'échine sous le poids de l'âge et des responsabilités. Elle trouvait toujours les mots pour décanter les situtations parfois trop complexes. Elle avait de la personnalité. Si j'étais chanteur, je lui dédierai sans hésitation une chanson à son honneur. Une mère de foyer dans le vrai sens du terme dotée d'une diplomatie notoire. Si la noblesse ( Xoraxu) était un comportement, cette dame serait sans doute plus noble que les  nobles ( Xooro) d'aujourd'hui même.

Dans le quartier, elle était connue de tous les jeunes. Scolarisés ou en déperdition, ils avaient tous un profond respect pour cette dame. Elle couvait tous les jeunes élèves du quartier de la CI en Terminale. A la fin de chaque semestre, elle sillonait les écoles et le Lycée de Bakel pour s'encquérir de la situation des élèves du quartier. Elle s'interessait très particulièrement aux résultats des collégiens et lycéens. Connaissant l'homme et soucieux de l'avenir de ces enfants, elle les prenait un a un pour leur remonter les bretelles en toute discrétion tel un chef d'entreprise avec ses salariés. Je me rapelle encore de cette matinée pluvieuse de Juillet 1999. Comme sa maison donnait accès à plusieurs autres concessions dont celle des Coulibaly où je passais mon temps libre, elle n'avait guère besoin d'alerter tout le quartier pour me voir. Il ne passait pas une journée sans que je ne passe par la maison des Cissé. Cette maison était également le point de ralliement de plusieurs jeunes du quartier les week-end ou pendant les vacances. Malgré la présence de la dame d'or gentille et respectée, les jeunes remplissaient la concession des Cissé telles des abeilles à la recherche de miel. Les jeunes venaient discuter, prendre du thé ou regarder la TV. Cette proximité avec jeunes lui a permise d'établir un portrait robot de chacun d'entre eux. Ce jour de Juillet 1999, si les oracles du " Bologné" ( grande route ) de Bakel m'avaient prévenu, je serais passé par la maison des "Barry" ou par le "Fanxané" ( bord de fleuve ) pour rallier le domicile des Coulibaly. En traversant, une voix douce et craintive m'interpella : " Petit "X", vient me voir. Mon sang fit un tour. Tout le monde savait que " Inspecteur Diokhané" n'appelait jamais de manière anodine. Elle avait des preuves irréfutables avant chaque interpellation. Elle me salua poliment et me demanda si j'avais du temps à lui consacrer. Pris de panique, j'acceptai sans hésitation. Elle me prît en aparté et me sermona avec des mots justes et véridiques. J'en doutais. Mes résultats scolaires décevants du premier semestre de ma classe de 3ème m'auraient valu un jour ou l'autre une éxplication devant "la gendarme" du quartier. Ce n'était point une exception. Tous les enfants du quartier étaient soumis au même rituel. C'etait juste mon tour parce que j'étais entré dans la mauvaise catégorie. Elle me respectait et avait une confiance aveugle en moi.

 

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