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La Voix du département de Bakel

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Prefecture Bakel

« Guidin-Khama » est un quartier vraiment particulier de la Commune de Bakel. Administrativement, il est appelé « Montagne Centrale ».

Surplombant la ville, il a un regard sur tout ce qui bouge dans cette commune.

Depuis la période coloniale, au moment où les français s’y installaient, il avait été repéré comme un endroit stratégique pouvant abriter leurs bases.

C’est ainsi qu’en 1818 a débuté la construction du Fort Faidherbe, actuelle Préfecture, le long du fleuve Sénégal. Un peu à l’Ouest de ce site, comme un képi de Général, le Pavillon René Caillé toise à son tour la ville et garde jalousement son histoire.

 

Au Sud, se trouvait la Tour Jauris appelée aussi Tour Télégraphique, derrière la maison des Cissokho. Aucune trace ne permet de la situer actuellement : elle a été complètement rasée. Ce site était pourtant très important. Toutes les communications de l’époque partaient de là.

Plus tard, un camp dit de Gardes, des Gardes Républicains (Police), avec une prison bien sécurisée a augmenté la particularité du quartier.

Les populations ont ensuite commencé à y habiter pour plusieurs raisons :

-la plus plausible, c’est la recherche de la protection. Entre ces bâtiments « administratifs », il est presque certain que l’on se trouve à l’abri des regards et surtout des attaques ennemies.

-les « Montagnards » sont des gens malins, intelligents. A l’époque, le fleuve débordait. Il sortait de son lit et noyait tous les espaces. La ville de Bakel était divisée en trois parties. A perte de vue, l’on ne voyait que de l’eau. De la deuxième décade du mois d’Août à la fin de la première quinzaine de Septembre, tous les champs étaient sous les eaux.

A partir du pont de Grimpallé, sous lequel passait cette eau, Fandalé était noyé, inondé par une eau devenue boueuse, sale en rejoignant les autres mares.

Est-ce pourquoi les populations ont construit dans ce quartier, au sommet ou sur ses flancs ? N’est-ce pas un moyen sûr de se protéger contre les inondations, les intempéries de toute sorte?

Mocirédin a les larmes aux yeux. Sa mémoire qui n’est plus jeune, le renvoie très loin, dans le passé.

Il revoit toutes les vieilles personnes d’autrefois, de son quartier « Guidin-Khama » : Boulaye Loli, Mociré Diarra, Mamadou Sakho, Fily Sabou, Bocar Kâ, Bocar Siré, Kaba Diarra, Sina Camara, Yély Sina, Bambo Touré, Birama Sambakhé, Mamadou Boughary, Salif Kounadi, Sidy Koné, Ali Diébakhaté, Barou Dia, Abou Néné, Yougoukhassé Sidibé, Oumar Djidia, Alassane Tamboura, Sadio Wattara, Mody Papa, Souleymane Hawa, Thiémokho Sidibé, Sadio Matel, Baba Coulibaly, Séno Waly, Magatte Guèye, Killé Kanté, Kantara Bamba, Samba Diémé, Dalla Maka et ses frères, Dioula Dabo, Djidou Ganda, Seydou Tacko, Mamadou Ly, Bina Konaré, Bakary Doumbé, Baba Niang et son frère, Moye Konaté, Dramane Finté, Mody Ndiaye, Malal Diakhité…..Ils l’ont tous marqué. Il doit les citer tous.

Ses larmes coulent davantage. Avec chacun de ces hommes, il garde au fond de lui-même une anecdote croustillante. Il sait, avec beaucoup de certitudes, que les choses ont changé, évolué (dans quel sens ?)

Tous ces « vieux » étaient « les papas de tous », autant craints que le père géniteur. Dans la rue comme partout, un respect d’un genre spécial leur revenait. Malgré la crainte, ils étaient aimés, adulés comme des plus –qu’homme, pas des saints, mais des êtres à part, grâce à leur éducation. Ils dégageaient une certaine noblesse, une fierté dans leur démarche, dans la manière de tenir leur grand boubou coincé derrière le dos tout en balançant une canne qui servait de tuteur pour certains, vu leur âge ou tout simplement pour rendre majestueux leur déplacement.

Chacun de ces hommes avait sa personnalité, sa touche, sa particularité mais tous étaient liés par une amitié qu’ils appelaient « montagnarde ».

Quant aux dames…

La sensibilité à fleur de peau du mari de Diambéré Khoumba interrompt sa « promenade spirituelle » car son regard se brouille et ses larmes mouillent sa poitrine.

Après ce moment de forte émotion, Mocirédin tente de revenir à hier et revoit d’abord sa mère Aissé Moussa Sidibé et sa sœur Dougharé puis Racky Ngaido, Sira Sakho, Haya, Hawa Diébakhaté « Moddo », Khoumba Méta, Sippa, Fatoumbiré, Maro Ganda, Asta Siré, Oumou Bala et ses sœurs, Malaw Niaghané, Dado Niéléba, Asta Baba, Tacko Ganda la grande matrone, Fatouman Diawara, Khamissa Diarra, Diaba Soumaré….

Que la liste est longue ! Comme pour les hommes, Mocirédin vouait un respect aveugle pour ces grandes dames !

La chaîne de l’éducation s’est rompue quelque part. Est-ce notre génération qui n’a pas fait une bonne transmission du témoin pour un bon relais éducationnel ? Avons-nous été surpris par le développement subit, supersonique des médias, le progrès plus que rapide de la technologie pour ne pas sentir les changements ?

Notre génération représente un trait d’union entre hier et aujourd’hui. Le futur nous écoute et nous regarde. Avons-nous joué le jeu ? Indexer Samba ou Demba n’a jamais résolu un problème. Ce qu’il faut, c’est ranger les discours, les belles paroles dans les tiroirs.

Ce qu’il nous faut ? Pour nous d’hier et ceux d’aujourd’hui, c’est que dans la pratique de tous les jours, construire du solide, c’est-à-dire être réellement un Modèle, un Exemple dans notre quartier par nos faits et gestes.

Tout doit partir de la famille pour s’étendre dans le quartier et se répandre harmonieusement comme une traînée de poudre dans la ville.

De son cœur et de son esprit, Mocirédin a vraiment extirpé tout ce qui lui faisait mal. Il se sent léger telle une feuille sèche emportée par le vent.

La nouvelle génération a du pain sur la planche. Elle doit jeter un regard plus lointain dans le passé pour bâtir un futur radieux. Se souvenir, n’est-ce pas quelque part faire renaître le passé, chercher à raviver la flamme d’hier et même à ouvrir des brèches dans la fenêtre du futur ?

Idrissa Diarra

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