Al hamdoulilah ! Al hamdoulilah ! Al hamdoulilah ! Mocirédin ne cesse d’implorer DIEU dans chacune des nombreuses positions qu’il adopte sur sa natte de prière, sous cet arbre qui a déjà atteint la moitié d’un siècle, planté là par son père, pourtant en période de chaleur.
Il fait chaud. Vraiment très chaud. Aucun souffle de vent. De temps en temps, cependant de l’air terriblement chaud fouette les corps fatigués par cette chaleur soufflant de partout.
<<-Diambéré Khoumba, ce nouveau monde m’inquiète tellement, à tel point que je ne sais plus quoi faire de mes jours, dit Mocirédin s’adressant à son épouse !
-Qu’est-ce qui peut t’ébranler à ce point, mon mari, répond la compagne fidèle ?
-Je n’ai jamais eu de salaire dans ma pauvre vie ! Je me suis, de tout temps, plaint. Mais tu ne cessais de me rappeler que je n’avais pas étudié dans les écoles françaises ! A mon âge, alors qu’on parle de recrutements d’enseignants, de …, de …. et de …, aurai-je la chance d’être recruté car je suis aussi un fils du pays, un enfant du Sénégal qui m’a vu naître sans aller à l’école des « Blancs », grandir et même vieillir ici, chez moi.
-Tu as tout dit, Mocirédin. Les deux principaux critères qui t’empêchent de postuler sont : le fait que tu n’aies pas de diplôme et ton âge !
-Ne me parle pas d’âge ! N’est-ce pas toi qui me pousses à aller aux champs ? Est-ce pour y dormir ? N’y suis-je pas du matin au soir, durant des mois, sous le chaud soleil ? Les enfants d’aujourd’hui, le peuvent-ils ? Epargne-moi tes analyses tordues, farfelues. Diambéré Khoumba, à part le lancinant problème de « boulot », nos Universités, nos écoles d’une manière générale sont dans un état lamentable ! Que dire de nos routes, de nos hôpitaux, de notre pétrole, de notre gaz et de toutes nos richesses minières mal exploitées? Que dis-tu de nos enfants, Héros d’une autre façon, qui bravent les flots et les sables chauds du désert ? Ils ne craignent plus la mort.
Le désœuvrement a transformé certains d’entre eux en toxicomanes, d’autres en loques humaines et quelques-uns deviennent fous à force de s’isoler, de
perdre tout espoir de réussite. Et avec ça, les politiciens osent casser nos tympans avec des promesses qui n’ont jamais été tenues!
-Si chacun fait et réussit le peu de ce qu’il doit faire, nous aurons compris que le monde est une véritable chaîne de solidarité, avance Diambéré Khoumba. Demain n’est malheureusement pas la veille !
-Alors, parle-nous d’autre chose. Par exemple du non-respect des mesures-barrières et de la chute du nombre de décès dus au Coronavirus au Sénégal pendant qu’ailleurs augmente ce nombre malgré la vaccination contre la COVID-19! Les accidents de la circulation, les derniers décès de nouveau-nés dans un hôpital pour cause d’incendie, la mésentente des décideurs sur les dates des fêtes religieuses, les cas de noyades qui se multiplient partout dans le pays, le manque d’eau dans tout le pays bien qu’on ait les fleuves Sénégal, Casamance et Gambie ? Qu’ajouter d’autres ? Et les dates des élections locales et législatives ? Tout se brouille dans ma pauvre tête !
-Vide-la donc, Mocirédin !
-Comment la vider alors qu’elle ne contient rien, ma chère épouse ?
-En ne pensant à rien d’autre qu’à ton champ qui nourrit ta famille, qu’à tes parents et à tes amis ! Sinon tu risqueras d’être surmené.
-Va pour ta proposition ! Elle est réaliste et facilement réalisable. Ce sera mon option. Je tourne le dos aux problèmes insolubles de ce bas-monde pour me consacrer à l’essentiel, c’est-à-dire : à ma famille. Je ne suis qu’un électeur, un simple électeur, détenteur d’une simple et unique carte !>>
Occupe-toi de tes « oignons » et tu seras le plus heureux du monde !
Idrissa Diarra bakelinfo.com
